Les Samis, un peuple autochtone méconnu, habitent depuis des milliers d’années les régions nordiques de la Scandinavie, de la Finlande et de la Russie. Leur culture, leur langue et leurs traditions, ancrées dans l’histoire et le territoire, témoignent de leur forte résilience face aux changements sociaux et politiques. Cet article explore les origines, la langue, l’organisation sociale, l’histoire religieuse, les droits modernes et la culture de ce peuple unique, souvent soumis à des pressions d’assimilation au fil des siècles.
Sommaire de l'article
Origines et Identité des Samis
Le peuple sami, aussi connu sous le terme de Sápmi (ou Sábme en langue sami), vit majoritairement dans le cercle arctique. Le terme « Sami » se substitue désormais aux appellations « lapons » ou « Finner », jugées péjoratives par la communauté elle-même. Les Samis constituent l’un des plus anciens peuples de l’Europe du Nord, et certaines légendes estiment leur présence sur le territoire norvégien depuis 12 000 ans, en même temps que les premiers habitants de la région.
Bien que les chiffres exacts de la population sami soient incertains, on estime que cette communauté regroupe entre 100 000 et 500 000 individus répartis en Norvège, en Suède, en Finlande et en Russie. Leur mode de vie traditionnel varie selon les régions, de l’élevage nomade de rennes dans les régions nordiques à l’agriculture et la pêche dans les zones côtières.
La Langue Sami : Une Diversité à Préserver
La langue sami, autrefois appelée « lappisk », appartient aux langues finno-ougriennes et se divise en plusieurs dialectes dont les principaux sont le nordsamisk, le lulesamisk et le sørsamisk. Malgré un travail de préservation, seuls environ 20 000 Samis maîtrisent cette langue, ce qui représente 15 % de la population totale. Les dialectes sami sont souvent incompréhensibles entre eux, illustrant une diversité linguistique riche, mais en péril.
Un travail intensif de revitalisation a permis de réintroduire certaines langues samies dans l’enseignement, afin de renforcer leur usage quotidien. Malgré ces efforts, la compréhension de la langue sami reste limitée, notamment en raison de l’assimilation linguistique pratiquée pendant plusieurs décennies.
Une Histoire de Résilience Face aux Conquêtes
Les Samis sont mentionnés pour la première fois dans des écrits romains en l’an 98 après J.-C., et plus tard dans les récits grecs et vikings. Pendant des siècles, ce peuple a subi de multiples conquêtes et taxations imposées par les royaumes de Norvège, de Suède et de Russie. Ce n’est qu’au XVIIIe siècle que les frontières entre ces pays ont été délimitées, empêchant ainsi la migration des Samis et de leurs troupeaux de rennes vers leurs terres ancestrales.
Avec le développement des États-nations, les Samis ont été contraints de s’adapter, perdant peu à peu leurs terres et leur organisation sociale traditionnelle en « siida », qui regroupait plusieurs familles partageant un même territoire pour les activités de subsistance.
L’Évangélisation et la Politique de Norvégianisation
L’arrivée du christianisme au XIe siècle marque un tournant dans la culture sami, avec la construction des premières églises et l’influence des missionnaires. Au XVIIIe siècle, sous la conduite de Thomas Von Westen, l’évangélisation en langue sami débute, avec la création de dictionnaires et de grammaires pour traduire les textes religieux. Toutefois, dès le XIXe siècle, une politique d’assimilation s’intensifie, obligeant les Samis à adopter la langue et les coutumes norvégiennes.
La loi de 1902 restreint l’achat de terres aux seuls citoyens norvégiens, excluant ainsi les Samis. Cette politique de « norvégianisation » force les Samis à renoncer à leur langue et à leur culture, un traumatisme dont la communauté souffre encore aujourd’hui.
La Renaissance des Droits Sami au XXe Siècle
Après la Seconde Guerre mondiale, la reconnaissance des droits culturels et linguistiques des Samis s’accroît. Dans les années 1960, la Norvège autorise à nouveau l’usage de la langue sami dans les écoles, marquant un tournant dans les politiques d’assimilation. La mobilisation pour les droits territoriaux samis s’intensifie dans les années 1970, notamment lors de la construction du barrage d’Alta, un projet menaçant les terres de pâturage traditionnelles.
Face à cette résistance, le gouvernement norvégien instaure la loi des Samis en 1987, menant à la création du Parlement Sami (Sametinget) en 1989, une institution qui permet aux Samis de participer aux décisions concernant leur culture et leurs droits. Cependant, leurs droits sur les terres et les ressources naturelles demeurent un sujet sensible et inachevé.
La Culture Sami : Artisanat, Religion et Patrimoine
La culture Sami se distingue par un artisanat unique appelé « Duodji », utilisant des matériaux naturels comme les peaux de renne, le bois, et les os. Ce savoir-faire est transmis de génération en génération et symbolise la relation profonde que les Samis entretiennent avec la nature. Le drapeau Sami, créé par Astrid Båhl en 1986, est un symbole de leur unité, portant les couleurs traditionnelles et les symboles du tambour chamanique et du dieu soleil.
Sur le plan spirituel, la religion Sami ancienne reposait sur le chamanisme, où le chaman (ou « noïd ») jouait un rôle central, avec le tambour de runes comme outil sacré. Cette spiritualité, même influencée par la christianisation, reste un élément clé de leur identité.
En conclusion, les Samis ont su préserver leur culture et leurs traditions malgré des siècles d’oppression et d’assimilation. Aujourd’hui, ils disposent de parlements nationaux et continuent de revendiquer leur droit à l’autodétermination et à la protection de leurs terres. Alors que les défis sont encore nombreux, le peuple Sami demeure un exemple de résistance culturelle et identitaire, incarnant l’esprit d’une culture profondément enracinée dans les terres du Grand Nord.
Texte rédigé par Kari pour Norvege-fr.com